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Résultat du Prix du jeune auteur 2018
Paris, le 2 mai 2019
Le prix du jeune auteur de la revue Sociologie du travail récompense cette année trois articles.
L’objectif de ce prix est d’encourager de jeunes auteurs à valoriser un travail de recherche et de les inciter à se confronter aux normes académiques en s’appropriant les codes de l’écriture scientifique et en jouant le jeu de l’évaluation par les pairs.
Onze propositions ont été reçues et évaluées cette année, par un jury composé de six collègues — trois extérieurs à la revue, Laure Pitti, Sylvie Monchatre et Joël Laillier, et trois membres du comité de rédaction, Marie Plessz, Laure de Verdalle et Bénédicte Zimmermann — et coordonné par Pierre Desmarez. Ces propositions étaient, pour la plupart, d’une grande qualité.
La sélection s’est faite en deux temps, avec un choix final qui a porté sur six articles. À l’issue de ce second tour, trois textes se sont détachés en tête du classement. Nous avons donc décidé d’attribuer trois prix cette année, les auteurs des trois autres articles présents au second tour étant pour leur part invités à proposer au comité de rédaction une version retravaillée de leurs textes, en vue d’une publication en varia.
Le premier prix est décerné à Alexis Louvion, doctorant à l’Université Paris-Dauphine, où il mène sous la direction conjointe de Sophie Bernard et Dominique Méda (IRISSO) une recherche doctorale intitulée « Blanchir les zones grises de l’emploi : le portage salarial, entre extension et détournement des institutions salariales ».
Son article, « Profession : (tiers) employeur. Les entreprises de portage salarial comme vendeuses de salaire », interroge la figure contemporaine de l’employeur et ses transformations à travers l’étude des entreprises de portage salarial. La thèse est celle d’une mise à distance de la figure de l’employeur au profit de celle d’entrepreneur. L’entreprise de portage est décrite comme un intermédiaire entre un travailleur et un donneur d’ouvrage. Cet acteur intermédiaire convertit la relation commerciale qui existe entre les deux premiers en relation salariale. S’appuyant sur une enquête menée auprès des directions de 9 entreprises de portage et de 35 « portés », l’article rend compte du brouillage entre les statuts de salarié, de client et de travailleur indépendant.
Le deuxième prix est décerné à Aurélie Gonnet, doctorante au Conservatoire national des arts et métiers (CNAM), où elle mène sous la direction conjointe de Michel Lallement et Léa Lima (LISE) une thèse intitulée : « Transitions professionnelles et professionnels des transitions. De l’épanouissement au travail à l’employabilité. Le cas du bilan de compétences ».
Son article, « Des motivations au travail. Fabrique et usages du bilan de compétences comme dispositif de (re)valorisation », étudie le bilan de compétences, inscrit depuis 1991 dans le Code du travail français, dans une double perspective : en revenant sur les conditions qui président à sa genèse, et en analysant ses usages. Il combine pour cela une approche socio-historique des politiques publiques et une ethnographie des pratiques de bilan (observations dans deux centres interinstitutionnels de bilan de compétences, complétées par des entretiens et l’étude de documents de travail et écrits professionnels). Il montre en particulier comment le bilan de compétences s’inscrit dans une « focale motivationnelle » qu’il contribue à diffuser et qui « occulte les dimensions socio-économiques des parcours et expériences professionnelles ».
Enfin, le troisième prix va à Saphia Doumenc, doctorante à l’Université Lumière Lyon-2, où elle mène sous la direction conjointe de Sophie Béroud (TRIANGLE) et Paul Bouffartigue (LEST) une thèse intitulée « Sociogenèse de l’engagement politique et syndical en milieu social précaire. Enquête auprès de travailleuses et travailleurs du nettoyage ».
Son article, « Anarcho-syndicalisme et nettoyage : l’improbable politisation de la lutte par le recours juridique », s’intéresse à l’action syndicale dans le secteur du nettoyage. Rappelant les caractéristiques qui rendent ce secteur peu propice à l’émergence de mobilisations collectives (féminisation, précarité, niveaux de qualification très faible, éparpillement des salariés, faible culture militante), il fait néanmoins le constat d’actions récentes et victorieuses. Pour comprendre ce paradoxe, l’autrice centre ses analyses sur le rôle joué par un syndicat de tradition anarcho-syndicaliste : la CNT-SO (Confédération nationale des travailleurs – solidarité ouvrière), et étudie les modalités d’action déployées par ce syndicat afin d’« atténuer l’improbabilité des luttes » dans le secteur du nettoyage, de les « rendre possibles, voire victorieuses ». L’article suggère que l’efficacité de l’action syndicale observée tient à la pluralité des « répertoires d’action » mis en œuvre, et défend l’idée selon laquelle la politisation des conflits ne repose pas uniquement sur l’engagement des salariés dans la grève, mais provient également de l’expérience des recours juridiques, généralement considérés comme participant d’une plus grande individualisation des conflits.
Ces trois articles seront publiés dans Sociologie du travail, vol. 61, n° 4, à paraître à l’automne 2019.
Les jeunes auteurs sont d’ores et déjà invités à préparer les articles qu’ils soumettront en septembre pour l’édition 2019 du Prix du jeune auteur :